La Fleur de l’âge

Quoi que l’on puisse penser de la composition des recueils de textes courts qui forment l’essentiel de l’œuvre et sans doute sa part la plus précieuse, elle témoignait le plus souvent d’un souci d’unité de thème, parfois, de dates et de genre, presque toujours. Dans les trois recueils qui paraissent au Fleuron, la maison d’édition créée par Maurice Goudeket, Trait pour trait, Journal intermittent et La Fleur de l’âge, la patte de l’éditeur devenu conseiller littéraire se faire sentir. Si Trait pour trait s’impose par une relative unité thématique en rassemblant, sous ce joli titre, des portraits d’écrivains (Anna de Noailles, Marcel Proust, Courteline, Léon-Paul Fargue), de comédiennes et de chanteuses (Sarah Bernhardt, Emma Calvé) de musicien (Claude Debussy), d’amis peintres (André Dignimont, Marcel Vertès, Luc-Albert Moreau, Camoin) et l’évocation d’un personnage sorti de La Comédie humaine (Mme de Marneffe, voir n°), les deux autres ouvrages réunissent pêle-mêle des chroniques et contes – mélange auquel Colette s’était toujours refusé -, des textes publicitaires et des préfaces qui étaient restés inédits. En ce début des années 50, alors que la source vive de la création semble s’amenuiser, Maurice Goudeket décide « de faire de Colette un auteur pour édition de luxe, un auteur rare, dont on recherchera les textes, un auteurs pour lequel les amateurs seront prêts à dépenser. » (Claude Pichois et Alain Brunet)

En témoigne ces trois volumes tirés à 480 exemplaires (450 exemplaire sur vélin bleuté et 30 exemplaires numérotés en chiffres romains réservés à l’auteur) destinés à un public choisi et dont l’impression fut confiée au délicat et virtuose Jean-Gabriel Daragnès, aisément identifiable derrière la mention « sur mes presses à Montmartre » (ses presses étaient situées avenue Junot) et sa marque au « Cœur fleuri » dont la devise, « Insita cruce / cor floret », était empruntée à la légende de Tristan et Iseult par laquelle il avait débuté son travail de graveur. Ce fut sans doute l’une de ses dernières productions ; le célèbre graveur-imprimeur, qui poursuivit avec passion l’art des typographes de la Renaissance devait mourir quelques mois après la parution de cette série, le 25 juillet 1950

L’objectif de Maurice Goudeket était bien commercial. Les textes réunis à la faveur de cette publication bibliophilique étaient dès le départ destinés à enrichir les Œuvres complètes dont la publication était strictement contemporaine (voir n°) et où leur composition sera encore modifiée. Bien que « le meilleur ami » ait souhaité – on le comprend – justifier l’édition de ces textes « disparates jouant l’un sur l’autre et se consolidant » (Près de Colette), le lecteur contemporain goûtera, sans souci d’une artificielle cohérence, les effets d’harmonie et d’échos que ces textes entretiennent avec le reste de l’œuvre confirmant cette composition symphonique ou rhapsodique à laquelle l’écrivain semble avoir toujours aspiré.

Colette
1873 - 1954
La Société des amis de Colette est une association loi 1901, reconnue d’utilité publique. Elle a été créée en 1956 afin de perpétuer le souvenir de Colette et de promouvoir son œuvre. Elle rassemble aujourd’hui plus de 500 membres. Adhérez

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