Un des volumes les plus rares de la célèbre collection créée par le fils d’Honoré Champion, le libraire-éditeur Edouard Champion.
« Edouard a beaucoup d’amis (…). Pour maintenir des rapports fréquents avec ceux qu’il aime, il a imaginé l’agent de liaison le plus noble et le plus délicat, le plus sympathique et le plus fidèle : le livre. Il choisit des textes d’amis, les imprime à ses frais, toujours chez le même imprimeur : Paillart d’Abbeville. » Tel fut selon Jacques Deville (L’Ami du lettré, 1925) le principe de cette célèbre collection, prisée des bibliophiles.
Colette avait fait la connaissance de la poétesse Renée Vivien dans le sillage de Natalie Barney, avec laquelle elle formait un couple cardinal dans le Paris Lesbos du début du siècle. Lorsque les deux femmes se séparèrent, Colette continua de voir Renée Vivien. Elle séjourna à plusieurs reprises dans sa villa près de Nice, avec Willy d’abord, puis avec Missy. On dit que Renée fut éprise du petit faune, mais que celle-ci se refusa et que la muse aux violettes s’en piqua. Colette, au fond, était gênée par ce qu’il pouvait y avoir d’excessif et, disons-le, d’un peu poseur dans le personnage qu’incarnait à la ville et dans ses textes Renée Vivien. C’est sous cet angle qu’il convient de lire le très beau portrait en forme de tombeau que Colette lui consacra.
« Colette est une bonne pucière, elle déniche les pièces rares. Le goût du bizarre qui indique la perversité, ce goût du mal presque fantastique, une maladie hautement vénérienne qu’elle a héritée de Jean Lorrain, y exhume de jolies choses poussiéreuses, ornées, biscornues, chargées de maléfices. Le pire, c’est qu’en vraie magicienne elle sait redonner vie à ses golems. Renée Vivien bouge avec plus de naturel que les Musidora du cinéma débutant. » (Simon Liberati)
Une première version du texte parut dans Le Figaro le 7 septembre 1924, sous le titre « Mausolées », dans la rubrique « L’Opinion d’une femme ». Colette le reprit une première fois dans Aventures quotidiennes (voir n°) puis le remania en vue de sa publication dans la collection d’Edouard Champion. Le texte subira une ultime métamorphose dans Ces plaisirs… en 1932, repris dans Le Pur et l’Impur en 1941. Tours et détours des textes, chez Colette.